Violence dedans… Violence  dehors de la tête

Date de publication : Feb 27, 2016 11:4:10 AM

VIOLENCE DEDANS…

VIOLENCE DEHORS DE LA TÊTE

Par Jean-Jacques Moscovitz

English version : trauma and traumatism

Il s’agit de trauma et de traumatisme entre sujet et collectif, entre moi-individuel et politique . Et comment le psychanalyste lit le monde et ses turbulences.

Texte exposé au Colloque organisé par le Comité Freud des 28 et 29 février 2016 à Tel Aviv ; « incidences subjectives et sociales actuelles du traumatisme psychiques ».

-I- AU REGISTRE DU SUJET

Je propose que Trauma soit posé au registgre du Moi, du sujet, et Traumatisme au registre du collectif. Appuyons nous sur Eros et Thanatos tels que Freud l'avance dans Malaise dans la civilisation de 1929. Ce mot malaise est bien sûr insuffisant, car il s’agit plutot de détresse, d’anéantissement, de la Hflosigkeit freudienne, du désarroi de l'enfant face au monde maternel primaire.

Soulignons combien Eros et Thanatos l'un avec l'autre sont imbriqués. ils ne correspondent pas respectivement ni au bien ni au mal. Freud décrit dans le Malaise que l’inanimé qui régnait dans l'univers au départ des choses du monde, le voilà rencontrant l'animé. Que fait-il sinon poursuivre sa course au sein de l'animé. C‘est le point de vue biologique de Freud. C'est là où l’imbrication entre liaisons et dé-liaisons pourra avoir lieu. Et leur déséquilibre risque d’être très dangereux. Là nous sommes du côté de l’individu. Utiliser ces deux sortes de pulsions de vie et de mort au niveau collectif pose un problème méthodologique quant à la gestion des jouissances de vie et des jouissances de mort .

En effet au niveau collectif c'est plutôt Éros qui prend le pas sur Thanatos dans le vacarme du monde et les crimes contre l'humanité, comme si Éros raptait la jouissance à Thanatos en vue de tueries, raptait son énergie alors que d'habitude Thanatos freine, bride Eros, comme le dit Freud à la fin de son texte Au delà de principe de plaisir.

En même temps, il dit ce point important. Soit qu’une motion pulsionnelle qui surgit va se heurter à son interdit par le biais du surmoi instauré dans la personnalité du sujet. Une lutte sans merci s'enclenche telle que le surmoi peut capter l'énergie de cette motion et ainsi la maîtriser. Parfois c'est le contraire et c'est la motion pulsionnelle qui l'emporte. Et tout vient à se casser se briser. Cela s'appelle peut-être rupture de

l'histoire.

Au niveau individuel, c ‘est le trauma qui, de fait, participe à la construction du Moi. La rencontre avec le sexuel dans le réel, donne sa chance au Moi de surgir et le sujet de l’inconscient en est causé, fondé dés qu’il surmonte ce Hiflosigkeit, le désarroi dans un rapport à l’Autre primordial suffisamment bon . Le trauma est structurant tel que je le propose, et le traumatisme au niveau collectif serait non pas ccnstructeur mais le plus souvent destructeur. Désarroi individuel de fonds, ce fonds esr débridé par un événement collectif.

-II- DE L’ENFANT

Cete notion de désarroi nous montre comment l'enfant, la jeunesse sont actuellement au premier plan. Concernant l’INFANS qui ne parle pas encore, il nous faut plus que jamais savoir qu'il a dû passer pour être un humain parlant par des phases bien compliquées, simultanément non seulement de la différence des sexes mais de découvrir s’il est une chose ou un être vivant, s’il est vivant ou mort, s'il est enfin masculin ou féminin.

Il y aurait, je le dis ainsi, une attaque de gens par la jeunesse et l’enfance aujourd'hui qui, si souvent tuées à travers la planète, deviendraient de tuées également tueuses. (cf Le Ruban Blanc de Heineke).

Comme si sur le modèle de la différence des classes, il s'agirait maintenant d'une lutte à mort dans un usage de la différence des âges. Sorte de révolution culturelle à la Mao étendue au monde entier.

La question se pose comment le politique entend l'enfant ou ne l'entend pas. Comment cette révolution culturelle new look pourrait-t-elle s'arrêter.

Il s’agit ainsi de l'enfant en nous et en même temps de l'enfant dans son enfance. Le psychanalyste y est impliqué par la découverte qu'il y a un insoumis à quelque chose qui s'appelle l'inconscient, peut-être l'inconscient propre au refoulement originaire. Il s'agit aussi de l'objet interne ciblé par le sexuel depuis le Moi et en même temps un objet en place de cause, qui fonde le sujet, et cela se retrouve dans le fantasme. Le fantasme est un espace/temps où prend place le trauma structurant, espace/temps où le réel du sexuel et le réel de la mort peuvent ou non s'articuler.

Par mort j'entends ici la disparition dans le monde maternel à quoi un père n a pas su, pu faire obstacle structurant. C’est dans le ratage de cette mise en place du fantasme que le traumatisme au plan collectif joue alos sa partie.

Cela va évoluer vers une absence de séparation fondatrice du sujet, ratage qui se retrouve dans le réel de la réalité.

-III- AU REGISTRE DU COLLECTIF

C‘est cette POROSITE, ce ratage entre espace du sujet et espace du collectif qui devient grandissante

Elle serait en train de nous mettre tous en desarroi au nIveau politique. Cf l’exemple de la Shoah qui après les crimes nous laisse aujourd’hui face à une porosité souvent destructrice entre 3 lieux d’histoires : la grande, celle des livres, le familiale, où la mémoire s’élabore, et celle qui est intime, subjective, pour l’enfant qui fait de la place comme il peut à ce qu’il en entend depuis son entourage. Mais nous sommes après alors que notre actualité nous met face à une porosité du même genre, soit que la prise du pouvoir par Daesh n’est que le moyen d’exercer sous le sceau du religieux, la cruauté comme idéal et cela se fait contre les corps.

Cela fait écho à la fameuse « prophétie » des années 1950 attribuée à André Malraux: « Le XXIe siècle sera religieux (ou spirituel) ou ne sera pas ». Vous savez combien il prévoyait que l’Occident allait en découdre avec l’Islam et le monde arabo-musulman, au point de dire vers la fin de sa vie (1975) que le monde commençait à ressembler à sas livres.

Mais en 1953 il avait dit: « Depuis cinquante ans la psychologie réintègre les démons dans l’homme. Tel est le bilan sérieux de LA PSYCHANALYSE. Je pense que la tâche du prochain siècle, en face de la plus terrible menace qu’ait connu l’humanité, va être d’y réintroduire les dieux. ».

Mais dans notre présent les vidéos, les articles, les films nous montrent que s’évoquerait le non encore humain , l’avant de l’humain (Violence en Islam, d’Adonis et Hourya Abdelouhaed, Le Seuil novembre 2015) , le retour à l’avant vie où Dieu reprendrait méthodiquement tout ce qu’il aurait donné, homme, femme, enfant, animal, l’un après l’autre. Dans les actes de tuerie de Daesh, il s’agit certes de la parole, des mots entendus, mais qui seraient lestés par l’imminence de l’acte moteur, qui collent leur corps à leur kalachnikow ( cf le film Salafistes de Margolin et Sellem)… Où détruire s’équivaut à punir… à la cruauté comme but final. Certes il s’agit des signifiants de l’islam mais sans doute plus de religion .

Cela commence à s’entendtr au grand jour en affirmant, sans rien cacher, une violence où le dedans de leur psychisme se confond avec la « motricité » de leurs proférations présageant l’action violente. La violence qui serait originaire au-dedans du psychique, la voilà également au dehors, non en pensée mais tout en acte moteur. « Affirmationnisme » dirons-nous, d’une parole MOTRICISEE, ordonnatrice du social..

-IV-COMME PSYCHANALYSTES

avons-nous à nous porter témoins du vacarme et des turbulences du monde ? Qu'est-ce QUI NOUS Y ENGAGE .

D’OU QUELQUES REMARQUES

Est-ce la perte de repères et la mise en place d’autres repères pour certains, qui deviennent alors des djihadistes allant jusqu’à l’extrême ? ou y a t-il d'autres repères plus accessibles où l’entrée dans la violence prend quelques temps et marque le pas devant l'histoire, pour moins l'abolir. Pour que L'INFANTILE ne disparaisse pas tout entier dans des actes dont notre époque nous fait témoins et victimes aussi ? Tout se passe comme si le devenir adulte se fait très vite, trop vite, et dés lors va brusquement régler les comptes avec cet adulte qu’il est devenu, et le suicider en tuant ? par l'acte kamikaze sans même que l’on puisse reconnaître l'existence d'un trauma fondateur de l’actuel d’avant l’acte.

Où s’ évoquerait trop aisément un rejet du passé parental, un rejet de l'histoire, pour valoriser une unique auto-référence à l'islam ? aucune anfractuosité dans le discours où un registre individuel ferait conflit psychique partageable, datable. Le traumatisme n’est que collectif : la CHARIA ne peut que s’appliquer toute entière et nécessite « le sabre » de la loi pour triompher. C’est repérable, c'est ce qui se produit sans cesse dans le collectif qui noie toute subjectivité dans des actions violentes sur les CORPS à anéantir. Tout devient embrouillé entre les temps originaires et celui de l'histoire présente, de l'actuel où nous sommes. Où l’origine se retrouve équivalente à la fin des temps.

-V-UNE PRE-VIOLENCE SANS FANTASME.

Où le corps devient un objet moteur qui doit agir sans cesse, collé à son arme.

Il n'y a plus la possibilité de dire le mot comme, qu’Aragon qualifiait d’être le plus beau mot de la langue française, et il l’est dans toutes les langues probablement.

La référence à la religion s'avère seule à avoir quelque valeur. Dans la mesure où toute religion réclame d'être responsable de l'origine de l'humain et de l'humanité, celle à laquelle nous avons à faire réclamerait d’être la seule parmi toutes les religions, y compris celles en islam. D’être le seul mouvement qui puisse avoir cette propriété, cette appropriation de l'origine . Et du coup le corps apparaît comme le lieu d’un règlement de comptes permanent qui s'effectue à ce niveau là. Où victimes et bourreaux sont confondus. Nous sommes dans l’a-humain comme le qualifiait Vlaadimir Jankélévitch.

Que vous a t-on fait vous si jeunes encore pour sortir ainsi de l’humain. Serait-ce que vos pères auront fauté, à l’instar des Etats totalitaires des pays de l’axe nazi, rappelez-vous, où pour réparer les fautes de leurs pères, Bande à Bader, en Allemagne, Armée rouge japonaise, Brigades rouges en Italie, et d’autres encore, répétèrent leurs fautes sans le savoir. Vos pères n’auront pas renouveler votre islam, trop soumis et trop corrompu ? au point de les réparer et de suivre et poursuivre en les exacerbant aujourd’hui les mêmes chemins ?

S’en prendre à la causalité occidentale cesse dés que le passage à l’acte s’effectue, c’est una autre causalité, une autre jouissance qui s’originent à une autre morale que celle qui régit l’Occident.

-VI-D’OU UNE HYPOTHÈSE SUR LA POROSITÉ

Partons d’un passage dans le séminaire l’ANGOISSE de Lacan, où il nous dit que pour que le monde de la parole ait lieu, il lui faut une scène, d’où trois termes le MONDE, la SCENE, le LIEU (ce sont LES REGISTRES R S I. de l’enseignement de Lacan)

MAIS IL FAUT QUE L’IMMONDE reste en dehors de la scène du monde pour qu’il n’ait pas lieu… et un jour l’immonde est monté sur le scène et a obligé la parole à faire un petit tour bien spécial, les tueries de masse … L’immonde qui cause le sujet par objet l’(a) , se fait engloutir dans le réel du collectif et nous oblige à marquer le pas devant notre pratique du sujet… Si comme le dit Lacan toujours bien venu, dans la pratique c’est le réel qui est entamé par le signifiant, je dirais qua dans l’horreur des meurtres de masse c’est le signifiant, le symbolique qui est englouti dans le réel. Et il y a là un retour à la compacité du réel, du collectif .. d’où cette scène planétaire devenant immonde qui a lleu et à la quelle on assiste par médias interposés. Là LE COUPLAGE BOURREAU VICTIME EST LESTE PAR LA MORT/MEURTRE qui est devenu objet du collectif, sans cesse jeté à notre regard.

Regard qui s’absente de voir vidéos et autres images pour préserver quelque chance pour le sujet.

ET tenter comme artiste, analyste, de le désembourber du couplage Eros Thanatos dés lors que ce dernier a passé le main à son pendant Eros qui non bridé par Thanatos se déploie dans des actions de meurtres génocidaires….

Jean-Jacques Moscovitz