RENCONTRES ? POURQUOI PAS ENTRE PSYCHANALYSTES…
Trois points : de l’associatif, de l’écart, du législatif.
-I-
De
l’associatif
Groupisme,
groupe, associatif, institution : des liens entre praticiens.
Si le
groupisme est la nécessité molle de ne pas se quitter pour ceux qui le
pratiquent, le groupe, lui, procède de ce « tous pour un, un pour tous », tel
qu’aucune tête ne dépasse. L’associatif organisé entre analystes est plus
enclin à faire lien avec d’autres associations. Et ce pour que l’homogénéité
qui est la règle, se confronte à l’hétérogène.
Et
l’institution psychanalytique se questionne et formalise ce qui la fonde,
surtout la formation du psychanalyste qui est si facilement esquivée.
L’admission des candidats reste sans cesse à élaborer, ce qui pourtant définira
de mieux en mieux l’institution pour analystes qui ne serait pas trop
quelconque…
Quant
aux réseaux type Inter-Associatif Européen de psychanalyse (I-AEP) et
Convergencia (Mouvement pour la Psychanalyse Freudienne) ils conduisent à une
prise de plus en plus institutionnelle de telle ou telle association
encore en panne vers un statut d’institution se questionnant d’elle-même.
Ces
réseaux sont là maintenant pour être des paratonnerres à la haine
grandissante de la psychanalyse, place que Freud et Lacan ont sue
occuper. Aujourd’hui c’est à nous de le faire. Peut-être par un contrat à
établir entre les différents réseaux existants…. Et ce pour le lien social
entre psychanalystes ne dérive pas au dogmatisme, à faire prévaloir la
passion de l’institution au dépens de l’écart propre au désir du
psychanalyste . Le réel de RSI est-il ici appui ?
-II-
DE
L’ECART
….« et
R et S et I » ouvre l’écart, exigible aujourd’hui plus que
jamais par l’accent mis sur le Réel pour maintenir cet écart propre au discours
psychanalytique par rapport aux autres discours. Mais aussi face à
lui-même : il ne peut se fixer, car dérangeant pour les autres discours,
il se dérange lui-même, se dé-fixe, s’écarte de sa ligne pour la retrouver plus
loin, plus tard…. Sa ligne est toujours en pointillé, elle se crée dans
l’écart du fait qu’elle « prend assise sur le Réel » ( in RSI 1974/75
chap 7,) .
Dire
réel, c’est repérer les risques que le discours analytique court de s’affadir
en dogmatique de type religieux, culturel, social, politique, médiatique,
pseudo-scientifique . Cet écart est Hérétique . La Passe comme
transmission indirecte de le psychanalyse est ainsi à replacer dans son
contexte historique et aussi actuel. La Passe dit le réel comme
impossible, elle est de l’ordre du nécessaire dans l’approche psychanalytique
de la transmission de cet impossible.
Dans
notre actuel une trop grande porosité entre sujet et collectif conduit à
un risque de confusion entre sujet de l’expérience de la cure et le
collectif,. En termes RSI : il existe une trop fréquente mise en
continuité entre « et R et S et I » , de psychose sociale que
le nœud trèfle illustre nettement.
La
psychose est certes traversée par le social, mais le social prend trop de
place dans nos rencontres au dépens des effets du désir du psychanalyste
Freud
comme Lacan disent ce risque : le premier à mettre la psychanalyse
dans le marché public (32E conférence sur l’Angoisse) et le
second la jetant en pâture au commerce culturel (4e
de couverture des Ecrits en 1966) . Ce qui a pour conséquence,
d’énucléer le désir de l’analyste hors de son situs habituel, de
l’affadir et de l’offrir aux résistances contre notre l’inconscient.
Du
coup les médias accouplés au politique tapent pile sur nos points faibles,
l’autisme par exemple, qui en France fait la une des médias, et
promouvoir un boycott de la psychanalyse avec les enfants voire de toute la psychanalyse.
DU
bobo, comment s’en servir en posant d’abord que les nœuds sont ceux de
Lacan, (cf Lacan à Caracas , « mes trois ne sont pas vos trois ») .
C’est de sa pratique psychanalytique dont il s’agit, de sa propre
pratique des nœuds, de sa façon à partir de 1972 de rendre compte de son lien à
la psychanalyse, à ses analysants devenant analystes. Que ses élèves ou
disciples directs s’en servent pose la question de savoir si le BoBo est un
modèle ou la matière même de notre expérience , le tricot avec ses
mailles, celles qui filent, se déchirent, font faux trou, vrai trou…
Remarques:
-chaque
rond de « et R et S et I », est premier , il n’y a pas de
hiérarchie des ronds entre eux, ils sont chacun hérétique.
-pas
d’origine des ronds et de leur nouage, il y a là subversion de l’origine
, de l’originaire, c’est déjà dire que la psychanalyse n’est pas religion qui,
elle , nécessite un fondement que Freud appelle meurtre premier du père, mort
depuis toujours, celui de l’identification première, dite incorporation
/einverleibung ( in Psychologie des masses chapitre VII), avec
l’identification au Trait unaire et identification hystérique. A lire l’Homme
Moïse (1938) de Freud à la lumière du BoBo, ce n’est pas de mono mais de
zérothéisme dont il s’agit. De Trou-théisme dit Lacan. C’est ici dire cet
écart d’avec le religieux qui s’approprie l’origine de l’homme, de sa
vie, de sa mort, de sa quotidienneté.
L’actuel
du vacarme du monde dans ces temps terribles d’attentats jihadistes le montre
cruellement.
Avec
RSI : Une 4e identification noue les autres entre
elles ; celle dite identification au sinthome, qui pose la question du
sujet. Ces trois ronds sont tels qu’un trou les tient ensemble. Qu’un trou se
fait exigence du trois. C’est le trou qui exige le trois fait de chaque
rond premier comme l’est chacun des trois.
Le
trou est là d’abord si on temporalisait la nodalité Bobo. C’est même (in
2eleçon du Sinthome) l’exigence comme telle qui exige le trois
faisant trou. Exiger c‘est penser « 3 ». (cf leçon 2 du
Sinthome )
Penser
bobo, aussi débiles que nous soyons dit Lacan, c ‘est suivre un des ronds
et se retrouver à en suivre un autre. Citons Lacan in leçon 7 de RSI :
« ce que j'appellerai l'imbécillité typique, typique du mens, de l'humeur
humaine, à l’endroit du réel qu’elle a pourtant à traiter ».
A se
trouver sur un rond comme la fourmi sur la bande de Moebius, voilà que je me
retrouve sur un autre rond que celui où je ne suis plus… Le réel du réel, qui
est le nœud comme nœud, pousse le « chercheur » dupe du réel à s’y
croire fourmi alors que ses pattes sont déjà ailleurs ! Ecart
d’écart oblige. Equivocité du signifiant dans la pratique de la séance. On
croit comprendre , ne pas être à coté : trop tard, l’inconscient du lieu
analytique me déloge de ma croyance et m’éjecte hors de ma certitude
soit-disant établie. Le dogmatisme guette, et ne pas le percevoir, le
dogme arrive et se fait religion laïque certes , mais bien religion quand même.
La psychanalyse prétendra alors être à l’origine du dire analysant, c ‘est,
dira t-il inscrit dans le corpus, la grille de concepts du moment .
Peut-on
nouer corps/réalité/image ?
La
mise ou non en continuité des ronds implique, quant au Réel, ce que Lacan
appelle ex-sistence : ce qui est hors du symbolique et hors de
l’imaginaire , et apparaît alors l’ex-sistence d’erres. L’erre est la trace
laissée dans l’eau par l’étrave d’un bateau, autant dire que ça dure peu.
Ici ce terme indique une zone afférente à l’entre-deux de trois ronds.
Erres : c’est ce qui jouxtent les entre-ronds. De telle sorte que
c’est le trou qui aiguille, guide, vers un autre rond dans l’entre deux ronds
qui fait aller dés lors dans un autre rond, et donc une autre erre. Ainsi
en est-il de l’usage qu’ en fait Lacan avec le 3 dans sa
lecture d’« inhibition/symptôme/angoisse » ).
Si le
trou exige le 3, le trou subvertit l’originaire des discours religieux,
scientifique, universitaire, du maître…et du roman familial du névrosé et de la
psychanalyse.
Le
corps a une erre réelle/imaginaire. Comment situer l’erre symbolique du corps
autrement que dans le croisement d’erres entre R et I dans l’affect d’angoisse
par exemple ?
Le
fantasme c’est le croisement imaginaire et symbolique , l’image qui
se fait lettre comme l’idéogramme chinois par exemple?
D‘où
ceci : la réalité se supporte d’un manque de perception qui comme manque
introduit le corps au registre du symbolique . Bref un donné sensible du corps
prête à la supposition du Réel.
La
trace se donne alors comment : exemple du Matiérisme en peinture. Comme si
des morceaux de peinture telles des lettres étaient jetées en l’air et
retombent. Et au cours de leurs chutes forment un lieu d’inscription, une
ardoise, la toile du tableau sur quoi vont se former des traces. Et dans
ce mouvement, se produit une sorte d’incorporation ( identification
1ere de Freud) grâce à un lieu surgi de ces chutes, où se déposent les
morceaux de peinture créant ainsi la toile du tableau en tant que
telle. Les croisements, les erres, les frottements des lettres en
mouvement entre elles ne cessent pas de fonder un espace qui se perçoit comme
surface alors que c’est de volume dont il s’agit, celui d’un corps.
Mouvement :
c’est dire que du temps présent, de l’actuel, se fonde sans cesse ,
créant un espace où s’agencent des lettres. Ecran de lettres formé à partir de
ce jet de lettres précédent. Précédent : le temps revient, est ce
religieux ? : « Topologie et le temps » sont en lien, dit
Lacan.
-III-
DU LÉGISLATIF
Deux
évènements politico-juridiques ont récemment interpellé la psychanalyse en
France. L’amendement Accoyer de 2003 aboutissant à la création d’un titre
de psychothérapeute par la loi du 9 août 2004 nommant la psychanalyse pour la 1ère fois
dans une loi de santé publique à partir d’une intervention de l’Etat.
Et
dernièrement la proposition de loi Fasquelles du 8 décembre 2016 visant à
interdire la psychanalyse dans la prise en charge de l’autisme et qui s’est
soldée par un rejet de la loi.
L’amendement
Accoyer avance que la psychanalyse est une psychothérapie, et au lieu de rester
un débat interne à la communauté analytique cela est porté au législatif
l’obligeant à réaffirmer par les instances ministérielles que sa conception du
symptôme n’est pas celle de la psychothérapie.
Des
divergences dans et entre les associations sont apparues, depuis ce
procès législatif amenant des associations à considérer la loi comme un abri ou
au contraire comme un danger venant reposer La question centrale de
l’analyse profane. Ces divergences ont tendance à récuser
le devenir de la laïenanalyse par une loi de santé
publique qui transforme la psychanalyse en métier possible.
Que
devient la laïen analyse si l’analyse en intention se trouve
désarrimée de l’analyse en extension ? S’il n’y a plus une solution de
continuité entre du non droit définitivement inscrit dans du droit ?
« On
a modifié le statut de l'autorité en psychanalyse en transformant l'autorité
morale que les sociétés et associations ont toujours exercée sur la
psychanalyse en un statut d'inscription dans la loi de la République ».
(D. Lévy Cercle Freudien)
C’est
la psychanalyse en tant que pratique de la cure qui s'expose sur la scène
politique de la santé démobilisant le DESIR DE L’ANALYSTE et son rapport aux
associations.
Comment
les effets du politique réorientent la demande d’analyse et comment la réponse
apportée par l’analyste porte l’empreinte DU DESIR D’INSTITUTION traversé par
le discours de la science et ses effets ?
Notamment
a folie n’a plus dans la cité le statut de la parole dans la culture,
mais uniquement celui de maladie.
L’évolution
progressive de la psychiatrie vers la santé mentale interroge le devenir de la
psychanalyse quand son lien aux folies n’est plus porté par la psychiatrie.
La
proposition de loi Fasquelles écarte toute approche analytique des
patients et de leur famille en s’encastrant de plein fouet dans le nouveau
dispositif de santé mentale qui a vu la psychiatrie (et la psychologie)
s’émanciper de sa dette envers la psychanalyse.
A
cette occasion, la plus grande partie des associations de psychanalystes et de
psychiatrie ont su défendre l’hétérogène de la clinique que la proposition de
loi visait à annuler. Elles se sont opposés aux parlementaires
qui voulaient rompre avec ces principes, en prenant parti dans des débats
scientifiques d’une grande complexité, pour dériver vers des thérapeutiques
d’État.
Sensibles
aux arguments invoqués dans les différentes actions, bon nombre de députés
n’ont pas remettre en cause la liberté des médecins, ni la
pédopsychiatrie ni la psychanalyse. Ni la liberté de prescription ni le
libre choix des méthodes de soin.
Et la
loi n’est pas passée du fait des effets de la psychanalyse en extension quand
elle n’est pas désarrimée de la psychanalyse en intention…..
Voilà
une rencontre pour s’opposer à ce que le champ juridique lui-même soit asservi
aux logiques de la gestion biopolitique.
Texte
de Psychanalyse Actuelle établi par Marie-Noelle Godet, Valérie Marchand, Jean-Jacques Moscovitz
Paris 22 MAI 2017